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Revue de littérature scientifique

Conclusion de la revue de littérature scientifique Le traumatisme post-IVG, une réalité scientifique ?

Dr Laurence Esterle, publié sur le site de l’ANCIC.

L’augmentation du risque de survenue de troubles psychiques après une IVG est très controversée sur le plan scientifique : certains auteurs montrent que l’IVG augmente significativement ce risque, d’autres, que ce n’est pas le cas. De nombreux problèmes méthodologiques ont été détectés d’abord dans la revue effectuée par Charles et al en 2008 puis dans celle du RCP en 2011. Au bout du compte, les deux seuls articles qui font preuve d’une bonne ou très bonne méthodologie montrent que l’IVG n’augmente pas le risque de développer des troubles mentaux si on prend en compte les antécédents de troubles mentaux. Les résultats de l’un des auteurs les plus prolixes sur l’impact négatif de l’IVG (Coleman) ont été contestés à plusieurs reprises par la communauté scientifique. Cet auteur s’affiche par ailleurs comme résolument ‘Pro-Life’, ce qui a pu mettre en doute son honnêteté intellectuelle. L’hétérogénéité de la qualité des méthodes et des résultats, qui a été notée dans la revue du RCP mais aussi dans celles de l’APA et de Charles et al, doit donc inciter à la prudence quant à l’utilisation de tel ou tel article par les professionnels de santé, les décideurs ou la société (au sens large), à faire preuve d’honnêteté intellectuelle et à recourir si besoin à une expertise méthodologique pour s’assurer de la crédibilité des résultats.

Au bout du compte, que peut-on dire sur le risque de survenue de troubles psychiques après une IVG (dans les pays où elle est autorisée) ?

Nos conclusions rejoignent celles de l’analyse du RCP, mais aussi celles de Charles et al et de l’APA :

  1. Aucune preuve tangible ne permet d’affirmer actuellement que l’IVG peut être à l’origine d’une augmentation de la fréquence de troubles mentaux ;
  2. Ce qui ne signifie pas que des femmes ayant eu une IVG ne présentent pas de troubles psychiques, et notamment les femmes qui présentaient déjà un trouble mental avant l’IVG, ou qui ont été exposées à certaines formes de violence ;
  3. Aucune preuve tangible n’existe actuellement pour penser que les femmes qui interrompent une grossesse non désirée présentent plus de troubles mentaux que celles qui l’ont menée à terme.

Dans la mesure où les facteurs de risque de la survenue de troubles mentaux après une IVG correspondent à des antécédents de troubles mentaux ou d’exposition à la violence, il appartient donc aux professionnels de santé de rechercher ces facteurs et de prendre tout spécialement en charge les femmes concernées.


Notes :
APA : American Psychological Association
RCP : Royal College of Psychiatrists