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Introduction générale - le théâtre

Parcours : mensonge et comédie

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  • Exposés ?

I - Le théâtre classique et le théâtre baroque - les règles du théâtre classique (unités, vraisemblance, bienséance) : utiliser la préface par Corneille, N. Boileau II - Corneille et son siècle III - Le mensonge comme ressort dramatique - dimension dramaturgique - dimension comique - dimension philosophique

Le menteur paraît en 1644.

Contexte historique

Pierre Corneille (1606-1684) est un homme du 17e siècle. Il a connu les bouleversements de sa période : la régence de Marie de Médicis, le coup de force de Louis XIII, les guerres civiles et religieuses, la Fronde, l’arrivée au pouvoir de Louis XIV.

Notions importantes à retenir : - l’État central prend une place croissante depuis François Ier. - Les grands royaumes européens sont à la fois liés par des mariages et en conflit constant, par exemple la France et l’Espagne. - Les conflits politiques sont recoupés par les conflits religieux entre protestants et catholiques à l’issue des guerres des religion. - Le régime en en France se dirige vers l’absolutisme et la concentration du pouvoir entre les mains de l’autorité royale.

Le cardinal de Richelieu, ministre d’État de Louis XIII est le véritable homme fort du pays. Il est le partisan de la “raison d’État” contre le “parti des dévôts” de Marie de Médicis, la mère du roi.

Éléments biographiques concernant Pierre Corneille

Pierre Corneille naît à Rouen en 1606 dans une famille devenue récemment bourgeoise.

Il fait des études de latin et de droit, se passionne jeune pour le théâtre. Il devient avocat à 18 ans (les études sont alors bien plus courtes qu’aujourd’hui).

Corneille n’est pas un bon discoureur ; il se contentera de procédures écrites. Il se tourne vite vers l’écriture de pièces de théâtre. Initialement davantage poète, Corneille innove en éloignant la comédie (il parle de pièce comique) de la farce.

En 1633, Corneille devient l’un des protégés de Richelieu qui lui fait verser une pension. À partir de 1634, Corneille rédigera davantage des tragédies. En 1637, Corneille publie le Cid. C’est une révolution, parce que cette tragi-comédie : - transforme presque entièrement l’action en discours et en récit - ne propose pas de résolution complète (les deux amants se marient, mais le père de Chimène a bien été tué.) Il en découlera une controverse importante, nommée la Querelle du Cid. L’académie française condamne la pièce.

Le menteur, en 1644, est son avant-dernière comédie. Après, Corneille se tournera exclusivement vers la tragédie, et sera finalement éclipsé par Racine.

Pierre Corneille meurt riche et honoré, titulaire d’un siège à l’académie qui l’avait auparavant rejetée. Ses pièces sont à l’époque parmi les plus jouées dans le pays.

Il lègue une expression qui sera forgée d’après son œuvre : le dilemne cornélien. C’est un ressort dramatique consistant à exposer un personnage à une alternative mauvaise dans ses deux branches.

Le Menteur, une comédie d’un théâtre qui devient classique

Le théâtre classique et le théâtre baroque - les règles du théâtre classique (unités, vraisemblance, bienséance) : utiliser la préface par Corneille, N. Boileau

Le mensonge

Le mensonge comme ressort dramatique - dimension dramaturgique - dimension comique - dimension philosophique


Dans cette préface, Corneille évoque des règles du théâtre.

J’ai tâché de la réduire à notre usage et dans nos règles ; mais il m’a fallu forcer mon aversion pour les a parte, dont je n’aurois pu la purger sans lui faire perdre une bonne partie de ses beautés. Je les ai faits les plus courts que j’ai pu, et je me les suis permis rarement sans laisser deux acteurs ensemble qui s’entretiennent tout bas cependant que d’autres disent ce que ceux-là ne doivent pas écouter. Cette duplicité d’action particulière ne rompt point l’unité de la principale, mais elle gêne un peu l’attention de l’auditeur, qui ne sait à laquelle s’attacher, et qui se trouve obligé de séparer aux deux ce qu’il est accoutumé de donner à une. L’unité de lieu s’y trouve, en ce que tout s’y passe dans Paris ; mais le premier acte est dans les Tuileries, et le reste à la place Royale. Celle de jour n’y est pas forcée, pourvu qu’on lui laisse les vingt et quatre heures entières. Quant à celle d’action, je ne sais s’il n’y a point quelque chose à dire, en ce que Dorante aime Clarice dans toute la pièce et épouse Lucrèce à la fin, qui par là ne répond pas à la protase.

Boileau, L'Art poétique (chant 3), 1674

Qu’en un lieu, qu’en un jour, un seul fait accompli
Tienne jusqu’à la fin le théâtre rempli.
Jamais au spectateur n’offrez rien d’incroyable :
Le vrai peut quelquefois n’être pas vraisemblable.
Une merveille absurde est pour moi sans appas :
L’esprit n’est point ému de ce qu’il ne croit pas.

Ce qu’on ne doit point voir, qu’un récit nous l’expose :
Les yeux en le voyant saisiroient mieux la chose ;
Mais il est des objets que l’art judicieux
Doit offrir à l’oreille et reculer des yeux.

La comédie classique

La comédie classique repose sur deux notions proches, évoquées dans les proverbes latins :

  • castigat ridendo mores ; “il corrige les mœurs par le rire”. Il s’agit de l’idée selon laquelle c’est par le spectacle du ridicule des mœurs représenté par exemple dans la comédie que le public se verra conduit à corriger son attitude. Molière, dans ses comédies à la dimension satirique évidente, se prévaut de cette notion.
  • Placere et docere ; “plaire et instruire”, devise inspiré de l’Art poétique d’Horace, poète latin du Ier siècle avant J.-C., et que reprennent à leur compte les classiques.

Les poètes veulent instruire ou plaire, ou, tout ensemble, dire des choses agréables et qui servent à la vie. Quelque précepte que tu donnes, sois bref, afin que les esprits dociles entendent promptement tes paroles et les retiennent fidèlement. Tout ce qui est superflu est rejeté de l’esprit trop plein. Que les fictions qui causent notre plaisir soient vraisemblables ; qu’une pièce ne demande pas qu’on croie tout ce qu’elle veut ; qu’elle ne retire pas un enfant vivant du ventre d’une Lamia repue. Les centuries de vieillards repoussent ce qui est sans fruit, et les Rhamnètes hautains passent outre devant les poëmes sérieux. Il enlève tous les suffrages celui qui mêle l’utile à l’agréable, qui charme et qui instruit le lecteur.